Les pertes alimentaires désignent les pertes physiques en aliments ainsi que les pertes qualitatives qui peuvent réduire la valeur économique d'une culture ou la rendre impropre à la consommation humaine. Le gaspillage alimentaire, en revanche, se rapporte aux aliments jetés ou utilisés à des fins non-alimentaires, bien qu'ils soient sains et nutritifs pour la consommation humaine.
Les raisons des pertes alimentaires varient selon les pays, et incluent la surproduction, la récolte prématurée, une mauvaise infrastructure de stockage et de transformation, des systèmes de marché inadéquats, des normes trop strictes pour le poids, la forme et l'apparence des aliments, ainsi que le manque de savoir sur une gestion post-récolte efficace. Les pertes alimentaires ont un effet immédiat sur le revenu des producteurs. Elles réduisent la qualité nutritive du régime. En plus, elles dilapident les ressources naturelles, telles que le terrain, l'eau et l'énergie, utilisées lors de la production des aliments perdus. Selon diverses études, un tiers des produits alimentaires destinés à la consommation humaine est perdu ou gaspillé, soit environ 1,3 milliards de tonnes par année. Selon la FAO, les pertes économiques mondiales dues aux pertes et au gaspillage alimentaires s'élèvent à 940 de milliards d'US$ par an.
Le concept de la sécurité alimentaire a fait son apparition au milieu des années 1970, lorsqu'une hausse rapide des prix a entraîné une crise alimentaire mondiale. En 1974, lors de la première Conférence mondiale de l'alimentation à Rome, la réduction des pertes post-récolte a été identifiée comme solution partielle de la faim dans le monde. Les participants évoquaient les pertes alimentaires causées par une gestion post-récolte insuffisante, et soulignaient la nécessité d'améliorer le traitement, le stockage, le transport et la distribution, ainsi que d'instruire et de protéger les consommateurs. La septième session de l'Assemblée générale des Nations Unies, réunie en 1975, s'était fixé pour objectif de réduire de 50 % les pertes post-récolte jusque 1985, suscitant d'abord un vif intérêt pour le développement qui s'est ensuite affaibli quand les prix des denrées alimentaires ont commencé à baisser.
L'envolée des prix des denrées alimentaires en 2008 et en 2011 a provoqué de nouvelles inquiétudes à l'égard de la capacité du monde de se nourrir dans le futur, compte tenu en particulier du changement climatique et de la croissance continue de la population mondiale. Ceci a réanimé l'intérêt pour la question si une réduction des pertes post-récolte pourrait améliorer la sécurité alimentaire. En 2012, des chercheurs finlandais ont estimé qu'un milliard d'habitants supplémentaires - soit 50 % de la population supplémentaire pronostiquée pour 2050 - pourraient être nourris des ressources actuelles si les pertes alimentaires étaient réduites à la moitié.1
Le Programme détaillé pour le développement de l'agriculture africaine (PDDAA) est le cadre politique de l'Afrique pour la transformation agricole, la création de richesses, la sécurité alimentaire et la nutrition, la croissance économique et la prospérité. A l'occasion du 10e anniversaire du PDDAA, les chefs d'État et de gouvernement de l'Union africaine (UA) ont déclaré que l'année 2014 serait l'année de l'agriculture et de la sécurité alimentaire, l'occasion d'évaluer les réussites et les leçons tirées de la première décennie de du PDDAA. Cet exercice a abouti à l'adoption par l'assemblée de l'UA de la Déclaration de Malabo sur une croissance accélérée de l'agriculture et une transformation pour une prospérité partagée et des moyens d'existence améliorés en juin 2014. L'objectif de réduire à la moitié le niveau actuel des pertes post-récolte fait partie de l'engagement à mettre fin à la faim en Afrique d'ici 2025.
D'après le rapport intermédiaire de 2017 à l'UA, seuls 20 des 47 États membres ont déclaré être en mesure de répondre à leur engagement prévu par la déclaration de Malabo. Le pronostic concernant l'objectif des pertes post-récolte est bien pire : seuls cinq des 54 pays du continent africain ont livré des données adéquates sur les pertes de leur pays (voir l'encadré ci-dessous pour apprendre ce qu'APHLIS fait pour aider).
Le rapport d'avancement énumère une série de problèmes, notamment le manque de :
En 2018, la Commission de l'UA a élaboré la stratégie de gestion de l'après récolte avec le soutien de la FAO. La stratégie, traitant les cultures horticoles, l'élevage et les produits de la pêche, présente une approche intégrée à la gestion des pertes post-récolte dans l'ensemble de la chaîne de valeur. Outre la réalisation des objectifs de la Déclaration de Malabo, la mise en œuvre de la stratégie vise à soutenir la réalisation de la cible 12.3 des objectifs de développement durable (ODD), décrite ci-dessous. La stratégie soutient également la réalisation des engagements des États membres de l'UA dans le cadre de l'Accord de Paris et des contributions déterminées au niveau national (CDN) pour réduire les émissions nationales qui résultent entre autres d'une augmentation de la production alimentaire, qui pour sa part est en même temps facteur et effet des pertes post-récolte. Les CDN, de même que les Mesures d'atténuation appropriées au niveau national et les Plans nationaux d'adaptation, sont des mécanismes importants pour intégrer la réduction des pertes et du gaspillage alimentaire dans le processus de planification du changement climatique.
Le Programme de développement durable à l'horizon 2030 a été adopté par les États membres des Nations Unies en 2015 en tant que modèle de paix et de prospérité. Au cœur de ce programme figurent les 17 Objectifs de développement durable (ODD) qui traitent des défis mondiaux tels que la pauvreté, la faim, l'inégalité, le climat, la dégradation de l'environnement, la prospérité ainsi que la paix et la justice. Les pertes et le gaspillage alimentaires sont traités sous l'objectif 12 "Consommation et production responsables". La troisième cible de l'objectif 12 vise à réduire de moitié le volume du gaspillage alimentaire par habitant au niveau de la distribution et de la consommation et de réduire les pertes alimentaires dans les chaînes de production et d'approvisionnement, y compris les pertes post-récolte, d'ici 2030. Tous les ODD réclament des approches globales et participatives, et sont interdépendants. Ainsi les progrès accomplis dans l'objectif 12.3 contribueront à la réalisation des objectifs de réduction de la pauvreté (ODD 1), de sécurité alimentaire et de nutrition (ODD 2), d'action climatique (ODD 13) et des objectifs concernant les ressources naturelles et écosystèmes (ODD 6, 14 et 15).
Les cibles définies dans les ODD - 169 au total - servent de directives pour aider les gouvernements à élaborer des stratégies de mise en œuvre et d'allocation des ressources en vue du Programme de développement durable à l'horizon 2030. Les pays utilisent une série d'indicateurs globalement reconnus pour surveiller et évaluer le progrès fait par rapport aux ODD et leurs cibles. L'indice mondial des pertes alimentaires (Global Food Loss Index, GFLI) a été conçu par la FAO qui est gardienne de l'élément traitant des pertes dans l'ODD 12.3. L'indice GFLI se concentre sur les étapes d'approvisionnement des chaînes alimentaires et mesure l'évolution du pourcentage des pertes au fil du temps pour un panier de dix denrées. Il couvre les pertes au niveau de la ferme, du transport, du stockage et de la transformation, et sert d'outil pour aider les pays à mesurer leur progrès dans la réalisation de l'objectif 12.3.
Les pertes post-récolte sont un problème résoluble. De nombreuses technologies et pratiques nécessaires pour traiter les pertes post-récolte existent déjà. Une large adoption de telles pratiques apporterait un appui important à la sécurité alimentaire et nutritionnelle. Mais il reste des défis à relever. Malgré les politiques favorables et l'intérêt des donateurs au cours des dernières années, les pertes sont toujours élevées.
Pour renforcer les interventions post-récolte, il est indispensable de vraiment comprendre l'ampleur réelle des pertes post-récolte. Mais il est très difficile de mesurer de telles pertes. Les chaînes logistiques sont complexes et la dimension et l'efficacité des processus associés ont tendance à varier selon les cultures, ce qui rend difficile l'obtention d'informations fiables sur les pertes. La collecte de telles données peut coûter très cher, ce qui a largement limité la capacité des pays à mesurer efficacement les pertes alimentaires au cours du temps. De plus, les nouvelles pratiques post-récolte améliorées ne sont souvent pas adoptées par les petits exploitants, soit parce qu'ils n'en sont pas au courant, parce qu'il leur manque les connaissances pour un emploi efficace ou parce que les coûts d'investissement sont juges trop hauts par rapport aux avantages perçus. Outre la faible adoption de technologies post-récolte améliorées, l'utilisation incohérente des bonnes pratiques agricoles et la participation limitée au stockage et à la commercialisation collectifs sont les principaux obstacles comportementaux à une réduction des pertes.
APHLIS recueille des données sur les pertes post-récolte en Afrique subsaharienne en combinant des informations issues de la recherche universitaire et des observations contextuelles d'experts locaux. APHLIS donne ainsi aux chercheurs, praticiens et décideurs politiques un aperçu très utile des pertes post-récolte à l'aide d'un système open-source économique ; il leur permet de se concentrer sur les cultures et les régions au niveau desquelles l'impact d'interventions sera le plus important. Initialement, APHLIS s'est concentré sur les pertes de huit cultures céréalières - le maïs, le sorgho, le mil, le blé, l'orge, le riz, le teff et le fonio.
Soutien d'APHLIS à la politique
En décembre 2018, APHLIS a organisé une masterclass en Afrique du Sud pour scientifiques et décideurs politiques traitant du rôle que les estimations post-récolte peuvent jouer en tant qu'appui à l'élaboration de politiques en Afrique subsaharienne. Il a été convenu avec la FAO que le nouvel indice mondial des pertes alimentaires "Global Food Loss Index" - un outil permettant aux pays de mesurer leur progrès vers la cible 12.3 ODD - utilisera les estimations d'APHLIS comme base pour les chiffres des pertes là où des mesures directes ne sont pas disponibles. Trois des cinq pays qui ont livré des données de pertes dans le cadre de leurs engagements de Malabo - Malawi, Rwanda et Ouganda - ont pu, avec l'assistance d'APHLIS, collecter à la fois les données de base et les données de vérification et sont ainsi sur la bonne voie pour atteindre leurs objectifs de pertes post-récolte d'ici 2025.
APHLIS développe des profils de pertes post-récolte - en pourcentage de la production - qui quantifient les pertes attendues pour chaque point de la chaîne de valeur après la récolte, de la moisson au stockage et jusqu'à la commercialisation. Les données proviennent de la littérature scientifique et décomposées par culture, type d'exploitation et type de climat. Les profils des pertes sont enrichis d'informations sur les conditions et pratiques locales susceptibles d'affecter les pertes dans des intervalles saisonniers ou annuels, telles que les conditions météorologiques, l'apparition de ravageurs et la durée de l'entreposage à la ferme. Les membres du réseau APHLIS collectent ces données auprès de sources officielles (p.ex. ministères de l'agriculture ou bureaux des statistiques) et mènent des entretiens avec les paysans et les agents de vulgarisation. Les données contextuelles permettent à APHLIS d'adapter les chiffres de perte pertinents des profils PHL aux circonstances spécifiques, et de convertir les pourcentages des pertes en pertes absolues à l'aide des chiffres de production. C'est à base des profils de pertes post-récolte et des facteurs contextuels qu'APHLIS estime les pertes aux niveaux provincial, national et régional. La collecte de ces informations par observation directe ou par mesure serait extrêmement coûteuse.
APHLIS ajoute à présent à sa gamme de cultures les légumineuses (haricot, arachide et niébé), les racines et tubercules (manioc, igname et patate douce) ainsi que les bananes et plantains. Nous serons bientôt en mesure d’émettre des alertes de risques et des évaluations des effets nutritionnels et économiques des pertes post-récolte. Nous adoptons de meilleures méthodes de modélisation et élargissons notre réseau d'experts Nous sommes, par conséquent, dans une excellente position pour pouvoir fournir aux décideurs des pays africains les données dont ils ont besoin pour répondre à leurs engagements en matière des politiques post-récolte.
1 Kummu, M., de Moel, H., Porkka, M., Siebert, S., Varis, O. & Ward, P.J. Lost food, wasted resources: Global food supply chain losses and their impacts on freshwater, cropland, and fertiliser use. https://doi.org/10.1016/j.scitotenv.2012.08.092
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